01 décembre, 2005

Les Cinq Sens




L’Odorat
Une odeur de plastique. La magie s’égare à l’extérieur… Et revient malgré nous dès que l’on ôte le capuchon. Alors là… Les narines palpitent, les yeux se ferment pour mieux savourer ce bonheur : un long tube rose et pulpeux. Une image se dessine dans mon esprit déjà enivré. Une grosse fraise. Des bois, surtout. Bien grasse et bien juteuse, qui parfume mon univers et affole mes sens.
Oh oui, il me fait envie, je le veux rien qu’à moi.

Le Toucher
Au début, c’est un peu froid : il faut le réchauffer. Je le recueille doucement au creux de mes mains, d’abord une, puis les deux ensemble. Je l’enveloppe, le frotte un peu. Peu à peu, il devient tiède, et c’est plus agréable ainsi. J’ai peur qu’il me fasse un peu mal. Cela ne dure pas… Le capuchon est lisse, arrondi. Une courbe harmonieuse, languissante et terriblement attirante. Je le tiens fermement.
Voilà, il glisse enfin, je vais pouvoir savourer mon plaisir.

L’Ouïe
Un crépitement, très doux. Presque un murmure… On pense à un corps qui se roule dans un drap de soie. Un frôlement obscène, un râle étouffé, un gémissement, puis un autre… Jusqu’à l’ouverture du capuchon blanc. C’est un peu poisseux, au dessous. Je le touche du bout des doigts. Et là… Délice et volupté. Ecartant cette minuscule corolle, l’écho distinct d’un doigt caressant cet orifice gluant, mais pourtant si doux… Je crois que je divague, je me pâme, je me tords en tous sens. J’entends presque mes propres cris.
On me l’a déjà dit. C’est si doux qu’on en mangerait.

Le Goût
J’aime les caresses. La langue sur la bouche, je lèche puis savoure les courbes graciles et fragiles de mes lèvres. Oui, les miennes. Je me fais plaisir. Et j’aime me faire plaisir. C’est ainsi…
Il m’en reste un peu au bord des lèvres, oh, pas beaucoup, non. Juste assez pour que je savoure encore et encore, pour en laisser couler un peu juste sur la pointe de ma langue. Et j’aime, je pense à un jus parfumé à la fraise.
Des bois, toujours.

La Vue
Ce mot résonne dans ma tête dans un éclat de paillettes argentées, de strass, de folles soirées américaines remplies de jolies filles blondes platine en robes froufrouteuses. Gloss. Gloss. Glossérisez-moi…
Un gloss… Juste un petit bout de mot ; on dirait qu’il n’est même pas terminé, d’ailleurs. Un jour, quelqu’un a dit en regardant l’objet : « Tu seras un Gloss ! » Et le gloss fut.
Entier, dans un si petit mot. Un mot qui brille de mille feux, pourtant. Et ce n’est même pas un rouge à lèvres. C’est juste un gloss, dans une trousse de maquillage banale, rouge et blanche, pas très jolie.
C’était donc ça.

7 commentaires:

Nuno Pires a dit…

Quelle maîtrise... quelle sensualité... Tu conserves l'ambiguité jusqu'au bout, parce qu'évidemment on ne peut pas se demander ce qu'est cet objet qui te procure tant de plaisir. On pense à tout (vraiment tout) et n'importe quoi (avec quelques idées toutefois). Et finalement, surprise, ce n'est que ça, un gloss, alors on aurait aimé que ce soit autre chose, et puis finalement non, c'est très bien comme ça...

. a dit…

Haha, excellent. Jamais je n'aurais pensé à cela, si je n'avais vu le nom de la photo : gloss.jpg, avant de lire le texte...
Mais ça reste tout de même un très bon exercice, ce mystère décliné sur les cinq sens.
Bravo :-)

Une fan du Petit Prince a dit…

Merci beaucoup à tous les deux :)
Mais rooo Sati... je n'aurai pas du donner ce titre, c'est vrai :D

Anonyme a dit…

Ouaich bah c'est cool tout ça ! J'aime pas le passage de l'ouï, POUAH top dégueu ! ;)

Anonyme a dit…

Les cinq sens... c'est presque musical, tant le mystère du "ce qui va suivre" dessine le suspense. Si j'osais inscrire votre écriture dans le domaine de la musique, je dirais que vous sentez ce que vous touchez, vous entendez ce que voyez. Mais où est donc passé le goût ? C'est certainement celui qui vous a permis d'avoir écrit et joué en même temps...
Bravo, continuez, on ne s'en lasse pas.
Bernard

Une fan du Petit Prince a dit…

Merci Bernard, de continuer à me lire ici :)

Anonyme a dit…

génial!
j'ai particulièrement apprécié le passage de la vue.
moi aussi j'aime beaucoup écrire des textes sans queue ni tête, que moi seule comprend.
tu manies les mots et ils prennent un sens différent...
merci beaucoup et surtout, continue!!